> Comme la série précédente « Connexion en cours », cette nouvelle websérie est diffusée via Facebook. Que tentez-vous de différent avec ce nouveau projet ?
Cette année, nous voulions tester une approche similaire à celle de Connexion en cours, mais avec un contenu documentaire et afin de voir comment sa diffusion pourrait s’opérer sur la plateforme. On expérimente aussi avec un nouveau format vidéo vertical. Nous avons pris cette décision en analysant le bilan de Connexion en cours. Nous avons vu que nos contenus étaient vus à plus de 75% sur dispositifs mobiles, à partir de Facebook. Nous avons donc fait le pari de créer une série en vidéo verticale, qui se prête mieux à l’écran de ce type de dispositif, souvent tenu à la verticale quand les gens consultent les réseaux sociaux. Les applications Facebook et YouTube permettent maintenant de consulter ce genre de format de façon très fluide dans leur flux d'interaction. On a aussi une diffusion quotidienne, une vidéo chaque jour alors que pour Connexion en cours les vidéos étaient mises en ligne à raison de quatre par semaine et ce, sur une période de diffusion similaire.
Notre stratégie au niveau de la promotion est aussi différente. Connexion en cours a profité de la diffusion organique généreuse qui était offerte par Facebook à ce moment-là aux vidéos natives. Malheureusement, les circonstances ont changé. Facebook a modifié son algorithme qui achemine les contenus aux utilisateurs et la portée des publications de façon organique a fortement diminué. Nous avons donc misé sur une stratégie de «publications sponsorisées» afin d’acheminer le contenu à un plus grand nombre d’intéressés sur une base régulière. Pour Connexion en cours, nous avons promu deux épisodes pendant la mise en ligne et quatre épisodes clés une fois la série entièrement disponible, afin d’attirer les gens vers le reste de la série. Cette fois-ci, pour 60 jours, nous sponsorisons au minimum deux publications par semaine et restons à l'affût de celles qui sont les plus populaires ; nous leur donnons un petit « boost » monétaire afin d’alimenter la diffusion de ces capsules.
> Quels sont les moyens nécessaires à la réalisation du projet ? On a l'impression que vous faites tout tout seul à la façon d'un YouTubeur indépendant...
C’est en majorité le cas ! Mais c’était un choix éditorial dès le départ du projet. On voulait montrer comment l’intelligence artificielle s’intègre à notre quotidien et proposer une documentation plus intimiste de l’expérience. Le choix d’en faire une grande partie seul et de centrer l’expérience autour de mon quotidien allait donc de soi. J’ai par contre pu compter sur de précieux collaborateurs dont l’aide a été indispensable pour certaines tâches. Par exemple, j’ai confié le mandat de produire le visuel des capsules animées à Simon Potvin-Goulet et Jean-Sébastien Bisson. Leur style de dessin et d’animation a aussi dirigé l’habillage de toute la série, élément sur lequel j’ai demandé la collaboration de mon collègue Bruno Provencher, designer graphique ici à l’interne, chez TV5 Québec Canada. Pour ces capsules, je me suis chargé de l’écriture et de la narration.
Lors des tournages des entrevues, j’étais aussi accompagné de David Ricard, qui est directeur photo et réalisateur indépendant. Il s’occupait de gérer la technique, autant l’image que le son, et je pouvais ainsi me concentrer sur la conversation avec l’expert rencontré. Ça aurait été très complexe de régler seul les deux caméras ainsi que les deux ou trois micros nécessaires aux tournages en plus de l’éclairage. Surtout que les experts que nous avons rencontrés sont des gens très occupés ; il fallait donc être efficaces avec notre utilisation de leur temps. Les entrevues à Paris ont été réalisées par Claude Vittiglio, un collègue journaliste de TV5MONDE. Comme j’ai effectué la recherche et l’écriture moi-même, j’ai aussi demandé à Myriam Verzat, recherchiste et communicatrice scientifique, de réviser et de valider mes trouvailles afin que le tout soit cohérent et juste au niveau scientifique. Pour le reste, j’ai pas mal tout fait seul !
Pour les capsules d’introduction, de tests et de conclusion, j’ai tout tourné chez moi (ou dans les alentours) avec ma caméra et mon micro (parfois même plusieurs caméras, comme dans le cas du test du drone pour lequel j’ai utilisé trois caméras et bien sûr les images du drone volant !). Je me charge aussi du montage et de la gestion de la page Facebook, des mises en ligne YouTube... J’assure aussi la partie planification et gestion du projet, la liaison avec les experts et les équipes de TV5 Québec Canada et TV5MONDE. En opérant de cette façon, on a énormément réduit les coûts de production de la série. Elle était d’ailleurs prévue au départ pour une trentaine d’épisodes, mais en cours de route nous avons réalisé que nous avions assez de matériel pour doubler ce nombre et offrir soixante vidéos, avec le même budget de départ ! Nous avons aussi conservé une bonne partie du budget de production afin de l’investir dans la promotion de «publications sponsorisées».
> Quel bilan faites-vous de la réception de la série à mi-chemin de sa diffusion ?
La réception est bonne et nous avons plusieurs commentaires positifs sur les différentes vidéos. On voit aussi qu’elle stimule la discussion et les réactions. C’est certain que la portée est moins grande pour ce type de production documentaire que celle d’une fiction comme Connexion en cours. On voit aussi l’impact du changement d’algorithme de Facebook en première loge. La portée organique de nos contenus à la mise en ligne est pratiquement le tiers, si ce n’est pas moins, de ce qu’elle était pour Connexion en cours, pour un nombre d’abonnés similaire. Par contre, on voit que l’intérêt des gens pour la série est bien là. Dès qu’on expose les gens aux contenus, les réactions et l’engagement sont au rendez-vous. On obtient un excellent taux de visionnement des contenus par rapport au nombre de personnes exposées. On voit aussi l’importance des partages dans la diffusion des contenus. Quand un contenu est partagé par les pages principales de nos chaînes ou dans le réseau des intervenants qui participent à la série, le nombre de visionnements grimpe de façon importante. On s'aperçoit aussi que les vidéos de tests ainsi que les capsules d’animation sont les plus populaires et de loin.
Pour la suite, on va redoubler nos initiatives de diffusion sur ces deux types de capsules et tenter de creuser la piste des groupes d’intérêts qui pourraient être intéressés à visionner, diffuser et partager certaines vidéos spécifiques. C’est une stratégie qui, je pense, peut permettre à la série de se faire découvrir et redécouvrir par des gens qui n’auraient pas été exposés au contenu en raison du changement d'algorithme. Dans une perspective plus large, je pense qu’il est important de se questionner sur la diffusion des contenus sur les réseaux sociaux, qui reste, malgré tout, et c’est mon avis personnel, le canal numérique le plus efficace pour rejoindre un large auditoire, différent de celui de la télévision. La portée de nos contenus sur ces plateformes pour un certain auditoire, plus particulièrement sur Facebook, n’est pas comparable à celle des contenus qui se trouvent sur nos sites web, mais en les utilisant, on prend un risque et on s’expose aux changements qui peuvent survenir au gré de la volonté des propriétaires de ces plateformes. Ces changements peuvent avoir un impact très important sur la diffusion de nos contenus, il faudra donc trouver des stratégies pour atténuer ces risques.
Propos recueillis par Hervé Lefèvre (Les MFP)
>>> Retrouvez tous les épisodes de la série sur Facebook et YouTube. À l'été 2018, la série sera aussi disponible dans une version « horizontale » sur les sites TV5.ca et TV5MONDE Plus.