Monsieur le Président, vous venez d’être élu Président des Médias Francophones Publics, quel est pour vous l’avenir de cette association ?
Les Médias Francophones Publics constituent une association internationale à la fois jeune et ancienne, elle hérite de la longue expérience des Radios Francophones Publiques (les RFP) et de la Communauté des Télévisions Francophones (la CTF). Mais elle est jeune, nous avons accueilli à Radio France sa naissance en avril 2016, sous l’égide de la Secrétaire générale de la Francophonie, Michaëlle Jean ! Donc, elle est tout entière tournée vers l’avenir.
En un an, sous la présidence de Gilles Marchand, et sous la direction d’Eric Poivre, Les MFP ont pris leur vitesse de croisière : les Commissions se réunissent sur un rythme régulier, elles permettent de véritables échanges d’expériences, de stratégies et de bonnes pratiques. Elles nourrissent même des projets, suscitent des initiatives, permettent l’adoption de nouvelles méthodes de travail inventées par un des partenaires et permettent des coproductions. Mon objectif numéro 1, c’est de faire en sorte que tout ce qui a été réussi en année 1 soit pérennisé, enrichi, développé, et devienne, en renouvelant les thèmes des travaux, une sorte d’accélérateur de notre adaptation aux nouveaux marchés et aux nouvelles pratiques médiatiques.
Par ailleurs, comme Les MFP sont aussi un Club de francophones, nous pouvons l’utiliser pour nous concerter et peser dans l’intérêt des médias francophones au sein des enceintes internationales. Je suis très attaché aux valeurs de la Francophonie et je suis persuadé que nous avons une voix originale à faire entendre dans cette « civilisation de l’Universel » où le numérique réalise l’intuition de Léopold Sédar Senghor.
Le PDG de Radio France a été choisi pour succéder à la présidence des MFP au Directeur de la Radio Télévision Suisse, Gilles Marchand. Son mandat débutera le 1er mai prochain. (Photo : Radio France / Christophe Abramowitz)
Vous prendrez vos fonctions à la tête des MFP le 1er mai prochain, avez-vous déjà fixé une priorité pour votre mandat ?
La priorité, c’est celle qui se dégage de l’Assemblée de direction que nous avons tenue aux Diablerets : pour l’année prochaine, parvenir à repenser la fonction et la mission des Médias audiovisuels de Service public afin de refonder leur légitimité dans le monde de profusion médiatique qu’est le monde numérique. Nos missions étaient clairement définies et acceptées dans un monde où la rareté des fréquences hertziennes et le coût des technologies employées faisaient des Médias publics l’essentiel de l’offre audiovisuelle, dans chaque pays.
Maintenant, la concurrence a explosé, nous ne produisons au contraire qu’une petite partie de ce qui est proposé au public. Nous devons rendre évident ce qui nous singularise et faire de cette offre un élément absolument irremplaçable. Nous en avons tous l’intuition, mais nous devons tous objectiver cette intuition et faire en sorte que tous en aient bien conscience, à commencer par les responsables politiques, mais aussi par tous les citoyens, qui nous financent et doivent bien comprendre pour quoi ils le font.
Nous allons donc mettre l’accent pendant l’année sur une recension objective, aidée par des chercheurs et des universitaires, de tous les éléments qui justifient et légitiment l’action des Médias publics dans les sociétés contemporaines. Ma conviction est que nous jouons un rôle décisif dans la vie démocratique et dans la vitalité de nos valeurs collectives.
Comment pensez-vous procéder pour rendre Les Médias Francophones Publics «plus créatifs et innovants» ?
C’est aujourd’hui l’impératif qui s’impose à tous les Médias publics : changer pour ne pas être dépassés, s’adapter aux nouveaux usages des publics et anticiper les mutations de l’audience. Notre association nous offre la possibilité d’aller plus vite en nous appuyant sur nos expériences respectives.
Par nos échanges constants, nous allons pouvoir profiter d’innovations qui seront soit répliquées dans chacun de nos pays, soit partagées afin de renforcer la puissance de l’offre des Médias Francophones Publics sur chacun de nos marchés et au sein de l’ensemble de la Francophonie.
Et quand on parle de Francophonie, on parle aussi forcément du Sud, de l’Afrique en particulier, où de nouveaux marchés se développent que nous devons apprendre à mieux connaître et à mieux prendre en compte. Car pour être créatif et innovant, il faut aussi être à l’écoute de ce que construisent les pays les plus jeunes, les plus dynamiques, les plus porteurs de croissance.
Propos recueillis par Marie-Christine Vallet (Radio France)